PRISCILLA, SOFIA COPPOLA NOUS OUVRE LES PORTES DE GRACELAND
Figure de proue du cinéma indépendant américain, Sofia Coppola est passée maître dans l’art de construire de passionnants personnages féminins en quête de liberté. Vingt-ans après son inoubliable relecture pop du destin de Marie-Antoinette, elle revient sur la tendre et douloureuse histoire de Priscilla Presley, ex-épouse du King. Rencontre.
Quand avez-vous découvert l’histoire de Priscilla ?
J'ai lu son livre il y a quelques années [Elvis et moi, paru en 1985, dans lequel Priscilla retrace les quatorze années de sa relation avec Elvis Presley, ndlr.]. J’ai été surprise de voir à quel point il était possible de s’ identifier à elle. Je ne savais pratiquement rien de Priscilla et de son histoire, alors qu’elle compte parmi les figures les plus importantes de la culture américaine. Par exemple, je ne savais pas du tout qu’elle avait vécu à Graceland, alors qu’elle était encore au lycée… Toute cette histoire semble d’abord difficile à croire, mais le fait est que Priscilla parle de sa relation avec Elvis d’une manière si révélatrice qu’elle en devient vraiment passionnante.
Priscilla Presley est un véritable personnage "coppolien", dans la lignée, entre autres, de Marie-Antoinette (2006) et des sœurs Lisbon de Virgin Suicides (2000). Comment avez vous réussi à vous saisir de son récit ?
Je me suis reconnue dans son histoire, bien que ma vie soit totalement différente de la sienne. J’ai le sentiment qu’il y a des étapes par les quelles on passe toutes, afin de devenir une femme. Le livre de Priscilla traite de thématiques auxquelles chaque femme peut s’identifier. Même si ce qu’elle a vécu peut nous paraître très éloigné de notre propre vie.
Le film raconte son histoire, mais brosse aussi un portrait inattendu d’Elvis.
C’est l’histoire qu’elle raconte elle-même dans le livre, que j’ai essayé de transposer à l’écran, de la manière la plus juste possible. J’ai vraiment pris soin de ne pas porter de jugement sur les personnages. Mon intention n’était pas de faire d’Elvis le méchant de l’histoire, mais plutôt de le montrer dans toute sa complexité.
Priscilla Presley est à la fois le sujet et la productrice du film. Comment avez-vous travaillé avec elle ?
Je lui ai demandé l’autorisation de porter son histoire à l’écran, je voulais qu’elle soit impliquée dans le projet. Il était impor tant pour moi que le film lui plaise, qu’il soit fidèle à qui elle est. En revanche, elle n’est jamais venue sur le plateau [...] Elle tenait à nous laisser de l’espace. J’étais effrayée à l’idée de lui montrer le film terminé ! Elle était très émue et m’a assuré que le film était fidèle à ce qu’elle avait vécu.
Comment avez-vous réussi à trouver un équilibre entre votre propre point de vue et celui de Priscilla ?
Je me suis efforcée de mettre en scène son histoire, sans être influencée par mon propre point de vue. L’idée était vraiment de toujours adopter celui de Priscilla. Pour cela, j’ai dû arrêter de penser en tant qu’adulte et en tant que parent, afin de vraiment me focaliser sur sa façon de voir et de ressentir les choses à cette époque.
Il est tentant de voir le film comme l’antithèse d’Elvis (2022). Les deux films apparaissent comme les deux faces d’une même pièce : en adoptant le point de vue de Priscilla, on découvre l’homme et le mari, qui se cachent derrière la star que l’on voit chez Baz Luhrmann.
Je trouve ça génial de pouvoir découvrir les deux côtés d’une même histoire. Si Priscilla est un personnage mineur dans le film de Baz Lurhmann, c’est parce qu’il s’attache à montrer la personnalité publique d’Elvis. Tandis que mon film dévoile plutôt ce qui se trame derrière les portes de Graceland, au même moment. Je pense que ce sont des films homologues, même s’ils sont tous les deux très différents, ne serait-ce qu’au niveau du style et de la mise en scène.
Pourquoi avoir choisi Cailee Spaeny et Jacob Elordi pour incarner Priscilla et Elvis ?
Il était très important pour moi que l’actrice qui incarne Priscilla soit une seule et même personne, capable de l’interpréter de ses 14 jusqu’à ses 29 ans. Cailee a tout de suite développé une vraie connexion avec le rôle, notamment parce qu’elle a grandi dans le Missouri, avec l’idée qu’Elvis et Priscilla étaient des personnages importants. En ce qui concerne Jacob, je le trouve vraiment charismatique. Toutes les filles l’adorent, même les miennes ! Il est l’essence même de ce qu’était Elvis : sexy, tout en étant sensible. Il fallait que l’on sente qu’il était possible de l’aimer, même s’il pouvait parfois être terriblement odieux.
Cette interview est issue du Mag by UGC.
Priscilla, un film labellisé UGC Aime, à découvrir actuellement au cinéma.