Après Le Prix du succès (2017), Teddy-Lussi Modeste revient avec une charge politique sur la vulnérabilité des professeurs face à l’institution. Il offre à François Civil un formidable contre-emploi.

C’est un film en phase avec son époque, dans la lignée d’un cinéma qui accompagne une prise de conscience sociale. En l’occurrence les manquements de l’institution dans la protection des professeurs, laissés à la merci d ’une vindicte parfois injuste et d’élèves encore trop jeunes pour mesurer les enjeux. Cer tains ont vécu le calvaire du cinéaste lui-même, ancien professeur de lettres dans des lycées et collèges. Accusé de harcèlement par une élève en 2020, il s’est muré dans la peur pendant plusieurs mois. Un sentiment qui a nourri ce film d’une complexité salutaire, quand la détresse des professeurs est régulièrement instrumentalisée à des fins politiques ou polémiques.

Coécrit avec Audrey Diwan, qui a respectivement œuvré sur les uppercuts féministes L’Événement puis L’Amour et les forêts, en tant que réalisatrice et coscénariste, le film dissipe d’emblée toute confusion. Ainsi, le professeur Julien (François Civil) est accusé de harcèlement, mais sur la base d’un malentendu. Rumeur oblige, la situation va déraper. C’est l’idée du cinéaste: imaginer un thriller paranoïaque sur les bancs de l’école publique, une institution pourtant censée garantir la paix sociale. Ce décalage est bientôt nourri par une réaction en chaîne, une suite d’erreurs à l’issue cauchemardesque, voire kafkaïenne dans sa noire absurdité.

FRANÇOIS CIVIL BRILLANT DE NATUREL

Le film se garde bien de tout jugement. L’enjeu n’est jamais de s’arrêter aux erreurs individuelles, mais au contraire d’étendre le problème à tout un système. En l’occurrence une école sclérosée par les rapports hiérarchiques, entre élèves et professeurs d’abord, puis entre professeurs et dirigeants. Si Julien paie un lourd tribut, c’est pour avoir osé remettre en cause ces rapports-là. Dans la peau de ce professeur à l’exigence haut placée, à l’humanité encore vive, François Civil brille par un naturel qui ne mise pas sur son habituelle image de tombeur. Tout en retenue, son jeu sert ainsi le propos d’un film où la peur agit de manière souterraine. Pas de vagues raconte enfin un état de notre société via de subtils non-dits, et sonde les graves tensions qui se jouent entre les élèves et dans leurs familles.

Cet article est issu du Mag by UGC.

Pas de vagues, à découvrir actuellement au cinéma.

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