KILLERS OF THE FLOWER MOON, L’AMÉRIQUE SELON SCORSESE
Le mythique réalisateur revient au cinéma avec un film-fleuve sur fond de crimes en terres amérindiennes, porté entre autres par Leonardo DiCaprio et Robert De Niro. Il signe une œuvre démentielle, qui revisite toute la galerie scorsesienne.
Si l’on devait résumer Martin Scorsese à un genre, le film de gangsters serait l’évidence – lui-même aurait hésité entre "devenir prêtre ou gangster" dans sa prime jeunesse. Nul doute que chez lui la mafia a quelque chose de sacré, voire mythologique ; elle est ancrée dans la culture du petit Scorsese, new-yorkais issu d’une famille d’immigrés italiens.Cette
dimension légendaire, le cinéaste s’en empare à nouveau avec Killers of the Flower Moon. Le tout à travers l’histoire d’Ernest (Leonardo DiCaprio), une petite frappe entraînée dans un tourbillon criminel pour s’approprier la fortune des Osages, tribu amérindienne qui s’est enrichie au début du XXe siècle grâce au pétrole.
Omniprésents dans l'imaginaire scorsesien, les gangsters et leur folklore sont ici amoindris en malfrats de seconde zone – le charisme des Affranchis (1990) semble déjà très loin. Maladroits, parfois grotesques, Ernest et son oncle patibulaire (Robert De Niro) enchaînent meurtres et combines pour éliminer ces Indiens gênants qui viennent contrarier leur orgueil de petits colons. Au point d’organiser un mariage pervers entre Ernest et une femme Osage (impériale Lily Gladstone), pour lui soutirer ses biens. Mariage pourtant court circuité par de réels sentiments, dans un jeu trouble qui écartèle encore notre antihéros, victime d’une machinerie familiale dont il est la marionnette.
CRIME ET CHÂTIMENT
Scorsese plante donc son décor chez les Amérindiens pour livrer "sa" version de la conquête de l’Ouest. Il s’inscrit ainsi dans la tradition du western, genre qui a évolué à mesure de la prise de conscience des crimes perpétrés sur les autochtones. Loin de tout romantisme, la vision du cinéaste insiste sur la brutalité comme sur la lâcheté des Blancs à l’égard des Osages – on leur tire d’ailleurs souvent dans le dos. Et revendique un autre récit américain, qui désacralise la figure du gangster. Déloyaux, opportunistes, cupides, Ernest et sa bande trahissent alors les fondements d’une nation bâtie sur une mare de sang et de pétrole. Il fallait bien une fresque virtuose pour raconter cette histoire vraie, qui a pourtant les atours d’une légende.
Cet article est issu du Mag by UGC.
Killers of the Flower Moon, un film UGC Aime, à découvrir actuellement au cinéma.