UNE ANNÉE DIFFICILE, TOLEDANO & NAKACHE AU FIRMAMENT
Avec Une année difficile, Éric Toledano et Olivier Nakache exorcisent les maux de la société par le rire. Et signent une tragicomédie autour d’un mouvement écologiste, vite squatté par deux hurluberlus sans foi ni loi. Le film, porté par Noémie Merlant, Pio Marmaï et Jonathan Cohen est une nouvelle réussite pour le duo de cinéastes. Mais quelle est leur recette ? Éléments de réponse.
LE COLLECTIF AVANT TOUT
S’ils sont si marquants, c’est que les films d’Éric Toledano et Olivier Nakache sont avant tout des films collectifs. Nourris par une forte émulation de personnages, de caractères, de situations, ils illustrent aussi la caractéristique majeure de leur cinéma : le duo. Leur rencontre est pour tant un coup du destin, de ceux qui déf ient les lois du déterminisme : Éric grandit en effet dans la bourgeoisie versaillaise, quand Olivier naît dans un quartier populaire de Suresnes. Tous deux cinéphiles dès leur plus jeune âge, c’est cette passion qui les soude un beau jour de 1995, tandis qu’ils animent un centre de colonie de vacances. Leur futur cinéma tient là tout entier ; dans cette diversité sociale à l’origine, puis cet amour commun pour l’encadrement des jeunes en colo. Une expérience dont ils tirent un court métrage puis le film Nos jours heureux (2006), resté célèbre pour sa séquence où Joséphine de Meaux insulte le pauvre gamin qu’elle sur veille. Le chaos dicté par une énergie enfantine, incontrôlable, la notion de collectif où germent à la fois de graves tensions et d’improbables rencontres ? On y cerne déjà l’identité des cinéastes, à son comble dans Une année difficile : à savoir l’étrange télescopage entre des militants écologistes et des hurluberlus surendettés, réunis sur un malentendu, mais réunis malgré tout.
LA COMÉDIE SOCIÉTALE
Bien qu’ils traitent de sujets parfois graves, notamment liés à la question du handicap dans leur plus grand succès Intouchables (2011) puis Hors normes (2019), Éric Toledano et Olivier Nakache usent d’une arme infaillible : l’humour. Voilà sans doute une autre clé de leur succès, qui doit beaucoup à cette écriture décompléxée. Véritables as de décompression, elle démarque leurs films d’un certain rigorisme social et trouve souvent une issue au tragique par le rire. Passer par l’humour évite le misérabilisme et les jugements hâtifs : chacun en prend pour son grade, dans un esprit fédérateur qui pousse à connaître son prochain. Dans Intouchables, c'est bien l’humour qui rapproche soudain ce riche homme blanc de son auxiliaire de vie sénégalais, ex-taulard qu’il a d’abord tôt fait de mépriser. Chez les cinéastes, l’humour est enfin une invitation à découvrir des milieux peu connus; des associations d’aide aux jeunes autistes dans Hors normes, une communauté de militants écologistes dans Une année difficile. Sans oublier d’effacer momentanément les frontières entre cinéma d’auteur et cinéma populaire, puisque leurs films fédèrent des spectateurs venus de tous horizons socioculturels. Un avantage qui leur permet de sensibiliser à grande échelle, voire de faire naître certains sujets dans le débat public.
LE CASTING CINQ ÉTOILES
Le cinéma d’Éric Toledano et Olivier Nakache peut aussi compter sur des comédiens dévoués et reconnus pour appuyer son propos. Très tôt, le duo se constitue une petite famille d’acteurs : leurs premiers films sont notamment liés à Jean-Paul Rouve et Joséphine de Meaux, respectivement inoubliables dans Nos jours heureux et le choral Tellement proches (2009). Dans ce dernier, l’actrice forme un couple avec Omar Sy, véritable muse du duo qui voit très tôt en lui un grand potentiel. Intuition payante : après des seconds rôles dans Nos jours heureux et Tellement proches, il explose dans Intouchables et ses 19 millions d’entrées françaises – un chiffre démentiel. Devenu une star, l’acteur retrouve ensuite les cinéastes avec Samba (2014). C’est que le duo s’attache à éclairer certains comédiens d'une autre lumière, comme les touchantes Izïa Higelin dans Samba ou Eye Haïdara dans Le Sens de la fête (2017). C’est encore le cas avec Une année difficile, où Toledano & Nakache offrent à Noémie Merlant et Jonathan Cohen des rôles peu explorés dans leur filmographie. À l’instar d’Omar Sy, les cinéastes font ainsi confiance à un comédien aux talents d’humoriste. Cela tombe bien : Jonathan Cohen brille en loser magnifique plein d’autodérision, aux côtés de Pio Marmaï.
Cet article est issu du Mag by UGC.
Une année difficile, film labellisé UGC Spectateurs, à découvrir actuellement dans nos cinémas.