DÉCOUVERTE UGC : GODLAND
GRANDEUR ET DÉCADENCE
Tout droit venu d’Islande, ce film élégiaque fait s’entrechoquer nature souveraine et vanité humaine, marquant au passage la naissance d’un grand réalisateur : Hlynur Pálmason (Un jour si blanc).
Un morceau de cinéma, rare : voilà comment nous pourrions résumer les 2h20 de Godland, une fresque historique impitoyable sur les désillusions d’un prêtre danois, chargé de bâtir une église en Islande et d’y photographier la population locale. Le film est venu à son réalisateur après qu’il est tombé sur de vieux clichés islandais datant du XIXe siècle. De quoi faire fructifier un imaginaire basé sur la notion d’authenticité. D’une belle ambition documentaire, Godland tire ainsi le portrait d’une époque marquée par un choc titanesque entre la puissance tellurique du monde – ici symbolisée par la majesté des paysages – et la foi religieuse des hommes.
Pour illustrer la souveraineté de la nature, Pálmason filme en grand-angle et dans un format carré qui rappelle celui des photos anciennes. Les hommes n’en sont que plus diminués, forcés de traverser des montagnes à cheval. C’est le cas de Lucas (Elliott Crosset Hove), ce prêtre missionnaire qui marche à l’aveugle et ne comprend pas l’islandais. S’il incarne l’autorité religieuse, le cinéaste en fait un homme taiseux et presque simplet, voire lâche, en totale contradiction avec ses apparats. C’est que la foi semble obsolète dans une contrée aussi hostile; du moins celle prônée au Danemark. En dépit de son savoir théologique, Lucas va ainsi devoir affronter sa propre humanité. Y compris dans ce qu’elle a de plus obscur.
UN CINÉMA DE L’ORGANIQUE
La caméra du cinéaste est moins du côté de la culture que de la nature, en témoigne son attention égale pour toutes les formes de vie, de l’homme jusqu’à la plus frêle racine. Elle est aussi du côté du temps, envisagé comme un rythme inaliénable qui consume et recouvre. Pour figurer cette idée, Pálmason va jusqu’à filmer la lente désagrégation d’un corps de cheval au fil des saisons. Une intuition de mise en scène qui traduit une bouleversante attention aux éléments, à leur minéralité, à leur poésie mais aussi à leur dangerosité. Le cinéaste fait preuve d’un œil suffisamment aiguisé pour voir et retranscrire le monde en quatre dimensions : de quoi nous entraîner avec lui dans un périple inoubliable situé aux confins du monde.
Godland, à découvrir dès maintenant dans nos cinémas, un film Découverte UGC.
Cet article est issu du Mag by UGC.